C’est en 1781 qu’est créée cette première version du Stabat Mater commandé à Boccherini par l’infant Don Luis, frère du roi d’Espagne, pour sa résidence de Las Arenas. Une seconde version suivra en 1801, le compositeur souhaitant éviter « la monotonie » en le transcrivant pour trois voix et en modifiant le tissu instrumental en substituant une contrebasse au second violoncelle.
Le principal attrait de ce Stabat Mater en est l’originalité de sa facture, Boccherini équilibrant le côté un peu opératique de l’enjeu (une constante dans le Stabat Mater depuis Scarlatti et Pergolèse…) par l’intégration de la voix dans le tissu d’un quintette à cordes au sein duquel le violoncelle dispute avec éloquence la première place à la soprano.
Le registre est celui de la désespérance sourde, du silence abruti devant l’énormité de la situation, une femme qui perd son enfant et en cherche le sens. Au risque sinon de la mièvrerie, du moins de cette fameuse « monotonie » que fuyait Boccherini dans la seconde version (quelle belle lucidité devant les errements possibles de son ouvrage…), mais que contredit la magnificence du timbre où il faut respecter cette option de linéarité, d’absences de vocalises ou d’ornementations : un aigu vrillant le cœur sur « O quam tristis » qui nécessite une voix d’une sobriété absolue, mais d’une magnifique élocution et intonation, et dont les harmoniques fruitées s’allient idéalement avec les cordes notamment dans les passages avec sourdines.
Boccherini restant Boccherini, on pourrait s’agacer çà et là d’une joliesse mélodique, d’une carrure quelque peu guillerette pour le sujet (Fac me plagis), mais on reste interdit devant la densité mélancolique de l’écriture, notamment dans les deux séquences extrêmes de début et de fin. L’interprétation en est complétée par un Quatuor en sol mineur, miroir idéal de l’atmosphère du Stabat